Club taurin de Paris
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Réunion du 13 décembre 2007

 

Robert Margé, découvreur et éleveur de braves

 

 

Robert Margé est un éleveur à l’ancienne mode, pourvu d’une exceptionnelle mémoire visuelle -qu’il a transmise à son fils-, il connaît chaque tête de son bétail. Il note tout ce qui concerne l’élevage dans de petits carnets, qu’il consulte souvent, ce qui lui permet de redécouvrir les recoins de la génétique de son bétail. Il n’a pas d’ordinateur.
Ce  n’est pas un héritier. Employé de banque, il commence  par élever des chevaux, puis des taureaux camarguais. L’occasion lui a été donnée d’acquérir des terres humides dans le delta de l’Aude ; il s’est lancé dans l’aventure le 2 mai 1978,  pour vivre comme il l’entendait et c’est un homme de forte détermination. En 1989, il est devenu organisateur des courses de Béziers, plus tard il a participé à l’équipée toulousaine de Fenouillet. Il a été un temps apodérado de Sébastien Castella, avec qui il est resté très lié. Il est fier “d’avoir participé à l’élévation de la cathédrale Castella, cela n’a pas de prix”.
Mais c’est avant tout éleveur de taureaux de combat, aventure qui a commencé en 1993. Son élevage se développe sur 2000 ha, 1000 ha d’un seul tenant dans l’Aude et 400 et 600 en Camargue. Il a en tout 800 têtes et trois encastes. Cela en fait le premier élevage de France et dans les 25 premiers en Espagne.
Une brève chronologie
1993 : achat de  66 vaches et un étalon à Cebada Gago.
1994 : achat de 66 vaches, puis encore 110 vaches à Cebada Gago.
1995 : achat de  70 vaches à Núñez del Cuvillo et un étalon.
2002 et 2003 : achat de  240 vaches vieilles de Santiago Domecq et un étalon.

 

CEBADA GAGO
En 1993, il achète les vaches et un étalon de Cebada. Il faut savoir que l’élevage de Cebada Gago a été fondé sur un taureau “Ajustador” (n° 11, sardo d’origine Cebada, Torrestrella, Santiago Domecq, Torrestrella et alii). Quand l’éleveur lui donne à choisir entre trois taureaux comme étalon, il y avait un taureau qui venait d’être tienté et qui lui avait plu par la manière dont il l’a regardé. Il l’a choisi sur ce regard. Il portait le n°11,  “Escandalito”, descendant de cet  “Ajustador”. Salvi, le fils de Don Salvador,  s’est disputé avec son père, car il ne voulait pas le vendre. Plusieurs années après, Cebada lui a redemandé le taureau pour couvrir des bêtes. Il a sorti un bon taureau dans les trois tiers en tienta, “Perdigón”, mi-Cebada, mi-Torrestrella, qui rafraîchit les familles et Julien Milleto lui a gracié un taureau à Saint-Gilles, dernier descendant de ce taureau “Escandalito” , qui était en très mauvais état après la course et qui a été sauvé par sa caste. L’éleveur s’estime tranquille pour 10 ans.

NÚÑEZ DEL CUVILLO
Ce taureau a beaucoup de noblesse, de qualité, mais aussi de la faiblesse, ce dont l’éleveur l’avait prévenu. Il a acquit un étalon de qualité exceptionnelle, mais il élimine aussi beaucoup de vaches. Cette année, il n’en a gardé que 20 sur les soixante de la camada.
Il a fait quelques expériences en mettant un étalon Cuvillo sur vaches de Cebada : ça ne marche pas.  Au contraire, un étalon Cebada sur vaches de Cuvillo peut donner des résultats qu’il faut voir évoluer avec prudence.

SANTIAGO DOMECQ
Il a acheté  35 très vieilles vaches de Santiago Domecq (15 ans ou plus),  qui ont un capital génétique important. Elles appartiennent aux meilleures familles de “Jandilla”, aux plus vieilles familles de Juan Pedro Domecq y Díez. Là encore, il a eu à choisir un étalon. Un lui plaisait plus que les autres. Il consulte les livres et découvre que ce n° 983, “Ajustador”, est fils de “Pocopelo”, descendant en ligne directe de ce fameux  Ajustador n° 11. Jackpot !

TIENTA
Il préfère la tienta de mâles à campo abierto, mais il y a des risques, un taureau peut se blesser et être inutilisable, alors il reste l’arène de tienta et les indultos, comme à Saint-Gilles.
Un étalon d’origine S. Domecq,  testé par Sébastien Castella a été cinq fois au cheval à campo abierto, il a chargé dans 180 muletazos, montrant de la bravoure, attaquant au  galop. Il compte sortir plusieurs fils de ce taureau.
Un taureau brave donne tout sur ce qu’il  charge. Les taureaux ne sont pas bons tous les jours, mais le très bon doit l’être tous les jours.
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Une vache peut être exceptionnelle en tienta, mais il faut qu’elle transmette aussi ses caractères.
Cela prend une dizaine d’années pour vérifier la qualité des produits d’une vache, d’abord en novilladas non piquées, puis en piquées et enfin en  corrida. C’est alors qu’elle devient fiable. Les vielles vaches sont toujours fiables. On sait ce qu’elles peuvent donner. C’est pourquoi on fait couvrir les jeunes vaches par de vieux sementales qui ont fait leurs preuves.

 

ELEVAGE
Les taureaux sont des ruminants, il leur faut de la fibre, donc ils sont à l’herbe  jusqu’a trois ans et demi, puis 6 kg d’aliments composés par jour, selon une formule maison. Pour les préparer à la corrida, un peu d’exercice tous les jours est utile.

 

En 2007, il a fait ses débuts en corrida dans une grande arène à Mont-de-Marsan, après avoir lidié à Vic-Fezensac et à Fenouillet. A chaque fois, avec succès. C’est un éleveur heureux. Après 14 ans, soit deux générations de vaches, il a un élevage cohérent, dont les animaux, quelle que soit leur origine, montre sensiblement les mêmes qualités : ce sont des “Margé”.

Philippe Paschel

 

PS. On lira le reportage d’André Viard dans Terres Taurines, opus 12 (mai 2007) p. 136-157.

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